Hommage de Chesterton à George MacDonald (3ème volet)

Par le Père Robert Wild. Publié dans la revue Gilbert et traduit et publié ici avec l’aimable autorisation de Dale Ahlquist.

George MacDonald

Il EST SIGNIFICATIF QUE CE QUE CHESTERTON A DÉCRIT comme « le tour » du conte concernait les lutins présents à l’intérieur, et le fait que la progression du pèlerin se déroule en grande partie à l’intérieur de notre propre maison. Personnellement, ce qui m’a particulièrement frappé dans cette histoire, lorsque je la lus pour la première fois, est le fil invisible que la princesse tient chaque fois qu’elle quitte le château. La charmante marraine dans la tourelle tient l’autre extrémité et tire un peu sur le fil lorsque la princesse s’engage dans un mauvais virage. Je trouve que c’est une belle allégorie pour les inspirations du Saint-Esprit. Mais Chesterton était particulièrement quant à lui frappé par les lutins et, je crois, voici pourquoi.

J’ai noté que Chesterton appelait les lutins des démons. J’ai publié un livre sur la préoccupation de Chesterton concernant le diable dans ses écrits, Jousting with the Devil. Chesterton était profondément conscient de l’existence d’un mal personnel malicieusement à l’œuvre dans le monde, sous les lames du parquet. Cette conscience et cette croyance furent un facteur essentiel et même causal dans la formation de sa vision (et surtout de sa vision de la vie comme d’une « bataille »). Réfutant une évolution purement naturaliste vers l’utopie, il écrivait :

Face à ce vide douloureux d’approbation sans joie, il n’y a qu’un seul antidote : la croyance soudaine et pugnace en un mal positif. Ce monde peut redevenir beau si nous le considérons comme un champ de bataille. Lorsque nous avons défini et identifié la chose mauvaise, partout les couleurs reviennent. Lorsque toutes les choses mauvaises sont devenues mauvaises, les choses bonnes, dans une apocalypse flamboyante, deviennent bonnes.

Il y a des hommes qui sont moroses parce qu’ils ne croient pas en Dieu, mais il y en a beaucoup d’autres qui sont moroses parce qu’ils ne croient pas au diable. L’herbe reverdit quand on croit au diable.

Le véritable optimiste ne peut rester optimiste qu’aussi longtemps qu’il est insatisfait. Car la pleine valeur de cette vie ne peut être obtenue que par la lutte ; les violents la prennent d’assaut. Et si nous avons tout accepté, nous avons manqué quelque chose : la guerre. Cette vie est un combat très plaisant, mais une très misérable trêve.

Sa première rencontre avec un mal personnel se fit avec des planches ouija, ou ce que l’on appelait en Angleterre une planchette :

Le fait est que j’ai creusé assez bas pour découvrir le diable, et même, d’une certaine manière, pour le reconnaître. Au moins, je n’ai jamais, même à ce premier stade vague et sceptique, été très sensible aux arguments courants sur la relativité du mal ou l’irréalité du péché. Peut-être que lorsque j’ai fini par devenir une sorte de théoricien et que l’on m’a qualifié d’optimiste, c’est parce que j’étais l’une des rares personnes dans ce monde du diabolisme qui croyait vraiment aux démons.

Et n’est-il pas très significatif que Magic, la plus populaire et la plus célèbre des pièces de Chesterton (même s’il ne la considérait pas comme sa meilleure), soit un « plaidoyer en faveur d’une croyance démodée en la réalité du pouvoir du mal » ? Chesterton lui-même déclarait à propos de cette pièce que « tous les personnages de Magic sont délibérément rendus bons, de sorte qu’il n’y a pas de méchant, sauf le grand Méchant invisible ».

Les personnes engagées dans le mouvement pro-vie pourraient être intéressées par les commentaires de Chesterton dans The New Jerusalem, où il dit qu’il est heureux que le christianisme ait eu à faire face aux dieux de Rome et non aux dieux de Carthage. Ces derniers étaient très cruels et exigeaient le sacrifice humain de bébés. Il dit que le Diable hait les enfants. En témoignent les Saints Innocents à la naissance de l’Enfant Innocent.

Chesterton affirmait avoir lu tous les romans de MacDonald, y compris Lilith. C.S. Lewis affirmait que la description par MacDonald de la résistance de Lilith à la conversion était la plus puissante description du mal qu’il ait jamais lue.

Ce que je veux dire ici, c’est que les lutins de MacDonald ont confirmé chez Chesterton sa croyance dans les mauvais esprits ; ils ont également confirmé son expérience selon laquelle nos lutins personnels se trouvent dans le cœur même de l’homme.

Le père Robert Wild est prêtre de la communauté de Madonna House à Combermere (Ontario), fondée par Catherine Doherty.

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